vendredi 31 mai 2013

Introduction au travail de Bérengère Hénin


Jeudi 6 juin 2013:

Vernissage du second volet de l'exposition Le Divin (é)Moi

Artiste invitée du 6 juin au 20 juillet: Bérengère Hénin





Un petit aperçu du travail de Bérengère Hénin au travers de son film Yo MoMA, présenté en 2011, au Salon de Montrouge.


Yo MoMA par berengere-henin




Extrait du catalogue de la 56ème édition du salon (http://www.salondemontrouge.fr/images/pdf/henin-h.pdf):


Le rire transversal

«On peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui », disait Pierre Desproges. Pourrait-on rire de l’art avec des kids de banlieue? Dans Yo MoMA, Bérengère Hénin met en scène un duel oral entre deux jeunes de quartiers américains:Big Rob et Big A. La vidéo se réfère à une émission de télévision américaine dans laquelle des gens se lancent des blagues de «ta mère».
Bérengère Hénin remplace les insultes ordinaires par des blagues pointues et érudites: «Your momma is so fat, you have to go visit her at the Monumenta», et «Your momma’s breath is so bad, even Beuys wouldn’t get in a cage with her». Bérengère Henin s’attaque ici à l’idée de l’art comme chose obscure et élitiste.Car qu’est-ce qui empêcherait, en théorie, qu’un groupe de jeunes s’intéresse à l’art au point de l’utiliser pour exprimer leur habitus? Bérengère Hénin arrive à mettre en question les hiérarchies culturelles et ouvrir un espace social quasi utopique, celui d’un art accessible à tous, grâce à un rire transversal qui ne connaît pas de bornes culturelles. Bourdieu en aurait été ravi.
Bérengère Hénin rêve de démocratiser l’art. Et pourquoi pas aussi l’art conceptuel,qui est souvent vu comme un art austère et inaccessible? Dans la série des Dessins Extraordinaires, elle reprend l’un de ses fondements, l’acte performatif de la création artistique: si l’on décide qu’une ligne représente le dernier jour d’un condamné à mort, cette ligne «devient» magiquement la représentation de
cette ultime journée.«Si l’on décide qu’une série de dessins – qui auraient pu être médiocres mais qui sont finalement extraordinaires – est digne d’être accrochée à un mur, alors elle le sera, et cette
position sera légitimée par la relation particulière que ce décalage instaure avec le spectateur»,nous confie-t-elle.
Une ligne symbolise La terre quand elle était plate; le dessin d’une fleur non effeuillée représente la possibilité du fait qu’«il m’aime passionnément». Des textes accompagnent ces dessins: Hénin parodie la forme autoritaire des audioguides, qui nous apprennent ce qu’il faut penser d’une œuvre. Comme le dit très bien Duchamp, tout dépend finalement du spectateur, dans la mesure où il participe (ou pas) à la signification de l’œuvre.
Tout artiste crée sa famille de pensée. Bérengère Hénin aime se confronter virtuellement à des artistes tels que Giotto ou Picasso, présentant même ce dernier comme son père dans une photo de famille. En reprenant dans un dessin la signature de Picasso pour former les lettres de son propre prénom, il apparaît alors évident qu’elle se moque de l’idée du «génie» et que sa légèreté conceptuelle, qui n’est pas sans rappeler celle de Baldessari, l’invite aussi à concevoir de la même manière la «virtuosité artistique».
Elle peut s’aventurer dans des champs nouveaux comme celui de l’animation, pour lequel elle collabore avec Chloé Mazlo, ou de la mosaïque pour une installation dans l’espace public réalisée avec Anthony Peskine. Hénin ne se classe dans aucun genre, si ce n’est celui de ladérision et de l’humour.

Sinziana Ravini